samedi 9 janvier 2016

Quand la vie rencontre la mort


Le 31 décembre 2015 alors que la grande majorité des gens s'apprêtaient à festoyer pour le Nouvel An, mon univers allait basculer à tout jamais. Mon ami et amoureux des derniers mois s'était enlevé la vie la veille. C'est moi qui l'ait retrouvé chez lui, sans vie, quelques heures après le moment fatidique où il n'y a pas de retour possible. Une partie de moi est morte au moment où je l'ai trouvé. Ma vie ne sera plus jamais comme avant.

 Nous nous étions quittés quelques jours auparavant. Une rupture. Et pourtant, nous nous étions parlés le 30 au matin pour planifier un souper "entre amis" le 1er au soir. Comment ne pas se sentir responsable de la mort de quelqu'un quand quelques jours avant on prend la décision de mettre fin à la relation? Depuis son départ, je rejoue dans ma tête les moments clés de notre relation, et essaie de construire différents scénarios qui auraient pu le garder en vie. En vain...il n'y a pas de "undo button" dans la mort. Il ne reviendra pas. Je devrai vivre avec les décisions que j'ai prises et les discussions que nous avons eu ou n'avons pas eu.

Il n'y pas de mots qui décivent la peine que je puisse avoir. L'incompréhension. La tristesse, les regrets des paroles jamais dites ou des gestes jamais donnés. Je suis bien entourée de ma famille et mes amis, et pourtant, personne ne peut comprendre ce que je vis. Il faut avoir touché à la mort et à la violence du suicide pour comprendre ce que je vis. Personne ne devrait avoir à vivre ce traumas. Je ne le souhaite à personne.

En choisissant de s'enlever la vie, Kevin a pris une décision égoïste. Quand on s'enlève la vie, on ne pense pas au raz-de-marée et à la vague de questionnements, de pleurs, de déchirements et de tristesse que ce geste cause pour les proches. Le suicide bouleverse. J'en serai marquée à tout jamais, de différentes façons.

Aujourd'hui était son enterrement. C'est tellement irationnel d'enterrer quelqu'un qui n'était pas malade, du moins physiquement. La famille est sous le choc. Je suis sous le choc. Tout est tellement irréaliste. Célébrer la vie de quelqu'un qui était parmi nous il y a une dizaine de jours, ça te chamboule des certitudes. Personne de la famille n'a perçu de messages de détresse de sa part. Il a bien bluffé, n'a rien laissé paraître. Il faisait même des plans pour le nouvel an. Nous n'avons rien vu. Ça ajoute à la culpabilité et à la tristesse.

Quand la vie rencontre la mort, bien des choses nous aparaissent soudainement très futiles et complètement ridicules. On réalise qu'on se fait des montagnes et des soucis avec des stupidités. Tout nous paraît tellement insignifiant.

Je ne saurai jamais pourquoi il a fait ça. Ce sera à tout jamais un mystère un questionnement qu'aucun de nous de pourra résoudre. Et c'est ce qui est frustrant avec le suicide de quelqu'un qu'on aime. On a aucune réponse à nos questions.

Où qu'il soit, j'espère qu'il est heureux et en paix. Mon deuil sera long et douloureux. Il ne souffre plus mais la souffrance est bien ancrée en moi maintenant. J'espère avoir la force de la rendre un peu moins douloureuse avec le temps.